L’athlétisme suisse en route vers les années ’20 Après des débuts chaotiques, l'athlétisme suisse peut aborder sereinement la décennie des années '20, ceci grâce à des bases structurelles plus solides. Cette période favorable va permettre à quelques athlètes de se révéler au niveau mondial, notamment aux Jeux Olympiques de 1924 à Paris.

À la suite de longues tractations entre la Fédération Athlétique Suisse (F.A.S.) et l’Association Suisse de Football (A.S.F.), une fusion entre les deux parties est active dès le 1er janvier 1920 : L’Association Suisse de Football et d’Athlétisme (A.S.F.A.). Ainsi l’athlétisme suisse va pouvoir continuer sa route sur de nouvelles base nettement plus saines. À l’aube des années ’20, de nombreux clubs d’athlétisme se fondent ou se reforment. Bien que les infrastructures de qualité fassent encore largement défaut, on note un nouvel élan bienvenu, qui ne va pas tarder à porter ses fruits. Jamais considérés sur le plan international, les athlètes suisses vont très rapidement réussir à tirer leur épingle du jeu, en parvenant parfois à faire jeu égal face aux meilleurs athlètes mondiaux au cours des années ’20 !
ATHLE.ch VINTAGE a également revisité cette décennie des Années Folles. Retrouvez les meilleurs moments de l’athlétisme suisse dans le livre intitulé « Les années ’20 », paru en novembre 2020.

 

EXTRAITS DU LIVRE « LES ANNÉES ’20 »

LE 800 MÈTRES DE PAUL MARTIN AUX JEUX OLYMPIQUES 1924 À PARIS

Ce mardi 8 juillet 1924 sera-t-il un jour de gloire pour Paul Martin ? Possible, mais c’est aussi ce que veulent les huit autres coureurs de la finale du 800 m… Le début de course est rapide et après 300 m de course, Paul Martin passe en sixième position. Le rythme s’accélère encore au début du deuxième virage, mais à ce moment-là le Lausannois est enfermé. En se décalant sur sa droite, Paul s’extirpe peu à peu du traquenard tenus par les Américains. Malheureusement il a perdu un temps précieux sur la tête de la course. Au moment d’aborder le dernier virage, à 250 m de l’arrivée, Martin est toujours en sixième position. À nouveau enfermé par l’Américain Richardson, il décide de passer derrière lui, puis de le doubler par la droite en faisant l’extérieur. Ça ressemble à un suicide, mais l’opération fonctionne. Dans le dernier virage, Paul se sent pousser des ailes qui l’incitent à aller de l’avant, encore et encore. Il arrive maintenant à hauteur d’Enck, qu’il passe sans coup férir. Incroyable ! Dans cette fin de virage, le voilà proche de Lowe et de Stallard. Il ne reste plus que 100 m et le Suisse possède enfin une piste dégagée, ce qui lui permet de lancer ses dernières forces dans la bataille. Il transcende sa foulée, en dodelinant sa tête de droite et de gauche. Dans le même temps, Stallard est en train de coincer et il ne reste maintenant plus que Douglas Lowe devant lui. Il revient fort en reprenant 20, 30, 50 centimètres, un mètre même, ce qui, vu depuis les tribunes, lui permet de franchir le fil d’arrivée sur le même plan que l’Anglais. À bout de souffle, aucun des deux coureurs ne sait qui est le vainqueur de cette finale endiablée. Debout côte à côte un peu plus loin de l’arrivée, les deux hommes tentent de récupérer comme ils peuvent. Martin apprend le verdict avant l’Anglais et se tourne vers lui :
– «Est-ce que vous avez gagné, Martin ?» dit Lowe en lui tendant la main.
– «Non, c’est vous !», répond le Suisse. En véritable gentleman, les premières paroles de Lowe sont :
– «Oh ! Comme je regrette, Martin, que vous n’ayez pas gagné !».
Dans un premier temps, le même chrono est affiché pour les deux athlètes. Mais très vite le classement est modifié en 1’52″4 pour Douglas Lowe et en 1’52″5 pour Paul Martin. Pour la première fois dans l’Histoire des Jeux Olympiques, un athlète suisse est monté sur le podium. Il s’en est fallu de peu pour que cette belle médaille d’argent n’ait été l’or olympique.

 

2° LE 400 MÈTRES DE JOSEF IMBACH AUX JEUX OLYMPIQUES 1924 À PARIS

Jeudi 10 juillet, on entame la seconde partie de ces Jeux Olympiques de Paris. Le Genevois Josef Imbach, qui a passé sans encombre les séries du matin, est engagé dans le sixième et dernier des quarts de finale. Au terme d’une magnifique course, le Suisse passe la ligne en vainqueur et reste en attente de son temps. Assis sur leur échelle, les chronométreurs ont fait leur travail, bon pied bon œil. Les résultats sont transmis au speaker, qui s’apprête à lâcher une véritable bombe : «Résultats du sixième quarts de finale du 400 m. Premier, Josef Imbach, Suisse, 48 secondes, nouveau record du monde !!!». Tout le monde est pris de court, spécialement du côté des journalistes, car il s’agit en fait d’un cas pour le moins épineux. En effet l’I.A.A.F. s’est un peu emmêlé les pinceaux dans le cadre de l’homologation des records du monde. Et finalement, on apprend que ce sont les 47″4 de Ted Meredith sur 440 yards qui font foi et non les 48″2 que l’Américain Charles Reidpath avait réalisé le 13 juillet 1912 en finale des Jeux Olympiques de Stockholm sur un vrai 400 m. Pour Josef Imbach, ce qui est sûr, c’est qu’il vient de signer un nouveau record suisse en battant d’une seconde et quatre dixièmes les 49″4 qu’il avait réussi le 3 septembre 1922 à Francfort. Le record olympique est également entériné par le C.I.O.; c’est toujours ça de pris !

 

3° LE 1500 MÈTRES DE WILLY SCHÄRER AUX JEUX OLYMPIQUES 1924 À PARIS

En ce jeudi 10 juillet, le camp helvétique n’est de loin pas encore au bout de ses émotions, puisque c’est maintenant l’annonce de la finale du 1500 m. Auteur du meilleur chrono des séries la veille, Willy Schärer sait qu’il n’aura pas la vie facile dans cette finale. Les trois tours de 500 m promettent d’être somptueux. Schärer est bien parti et sa troisième position dans ce peloton compact semble être une tactique judicieuse. Après une bonne centaine de mètres, le Finlandais Paavo Nurmi est maintenant en tête, suivi comme son ombre par Lowe. Le rythme des deux hommes est tellement soutenu qu’il va créer une petite rupture avec le reste du peloton après déjà 300 m de course. Toujours en troisième position, Schärer emmène la meute. Le rythme imprimé par Nurmi est trop rapide pour Lowe, qui doit rentrer dans le rang. Au contraire, l’Américain Watson tente de suivre à son tour le « Finlandais volant », qui passe aux 1000 m en 2’32″0. La cloche retentit et c’est là que Nurmi accélère encore, ce qui provoque le vide derrière lui. Watson tente de résister maintenant au retour de ses adversaires, dont le plus fringant de tous est Stallard. Le Britannique passe sans difficulté Wiriath et rattrape Schärer, qui dans le même temps s’apprête à déborder Lowe et Watson. Alors qu’il ne reste plus que 80 m, Nurmi se retourne et constate qu’il va gagner ce 1500 m. Derrière, le sprint entre Stallard et Schärer est fou. Le Suisse est héroïque et finit par passer rageusement dans les vingt derniers mètres. Il décroche ainsi une merveilleuse médaille d’argent en 3’55″0, soit un record suisse battu de presque sept secondes ! Cette médaille d’argent est un énorme exploit car il faut bien comprendre que le niveau de cette finale olympique était absolument énorme. Galvanisé par la facilité de sa qualification lors des séries, le coureur de la GG Bern a su saisir sa chance dans cette finale en courant très intelligemment. Au final, Willy Schärer apporte une seconde médaille d’argent à la Suisse, deux jours après celle remportée par Paul Martin sur 800 m. En faisant preuve d’une totale abnégation dans leur dernière ligne droite de Colombes, ces deux coureurs ont véritablement fait honneur à notre pays. Ces médailles ne sont que la juste récompense de tous leurs efforts fournis ces dernières années.

PAB

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Lien vers le dossier « L’athlétisme suisse durant les années ’20 »

 

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