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En 1950, le record du monde de la mythique distance entre Marathon et Athènes était de 2h25’39 ; en 1960 de 2h15’16 ; en 1970 de 2h08’33. Depuis le marathon de Berlin 2014, il est de 2h02’57. Nike veut descendre sous les deux heures. Comment ?
En engageant les meilleurs coureurs, le champion olympique de Rio Eliud Kipchoge (KEN/2h03’05) en tête, et en faisant appel à la science pour « défier les lois du possible ». En fabriquant des nouvelles chaussures, plus légères et réactives que nulle autre, en s’appuyant sur une équipe de scientifiques de pointe, en optimisant comme jamais l’entraînement, la nutrition, les conditions de course et finalement même les athlètes. Pour une « incarnation suprême de la mission de Nike : amener de l’inspiration et de l’innovation. Modifier le cours de l’histoire en découvrant les ressources cachées du potentiel humain. »
Bref : Nike met le paquet pour faire trembler les limites. Alors que l’éventuel record ne sera de toute façon pas homologué par la Fédération internationale d’athlétisme, l’équipementier aura surtout contribué à flouter les contours entre sport et promotion commerciale, légalité et illégalité, homme et machine.
Un drôle de jeu, d’autant plus mal venu que la marque est impliquée dans plusieurs polémiques. A commencer par celle concernant son « Nike Oregon Project », groupe d’entraînement coaché par l’emblématique et controversé Alberto Salazar, basé dans les quartiers généraux de Nike aux Etats-Unis avec pour mission de redorer le blason du fond américain. Le groupe qui compte plusieurs champions olympiques bénéficie des ultimes découvertes de la marque en matière de technologie et de soutien médical, jusqu’à la limite du légal, si ce n’est au-delà. Actuellement visé par une investigation de l’agence américaine anti-dopage, le groupe aurait eu recours ces dernières années à toutes sortes de méthodes illicites et utilisé les réseaux de Nike pour dissimuler les preuves aux enquêteurs. Ceci sans même parler de la championne olympique en titre du marathon Jemima Sumgong (KEN), soutenue par la marque à la virgule et pincée pour dopage il y a peu.
Dans ce contexte pour le moins bancal, Nike ferait mieux de reclarifier ses limites que de chercher à en faire trembler de nouvelles. Honoré d’être partie prenante du grand projet marketing, Julien Wanders et son entraîneur Marco Jäger avouent eux-mêmes ne pas en être de grand fans.